17 novembre 2006

stratégie d'investissement en bourse

Voilà un blog bien argumenté et très intéressant sur le sujet par Forcast : http://forcast.canalblog.com/
Je me permets de reprendre un article publié à l'origine sur le forum SICAV de Boursorama.

Démêler les anomalies du marché boursier (j.roger5)

La valeur génère de meilleurs rendements que la taille de l’entreprise ou le momentum du titre

Demandez à un économiste financier ce que ça signifie quand un titre perd la moitié de sa valeur sur le marché boursier. Il vous répondra que c’est un titre qui est devenu deux fois plus risqué. Une action, dira-t-il, ne perd pas la moitié de sa valeur pour rien. C’est le signe que la compagnie affronte de nouveaux obstacles qui rendent son avenir (et ses bénéfices) plus périlleux ou plus aléatoire.

Demandez maintenant à Warren Buffett ce que ça veut dire quand un titre perd la moitié de sa valeur. Il vous répondra, comme il a déjà eu l’occasion de le faire, qu’il n’est pas deux fois plus risqué, mais tout simplement deux fois plus attrayant.

Ces deux opinions en apparence divergentes évoquent dans mon esprit l’image du verre à moitié vide et à moitié plein. Il est bien possible, en effet, qu’une nouvelle information au sujet d’une entreprise augmente la probabilité que ses profits futurs soient deux fois moins élevés que prévu. Mais il est bien possible aussi que cette nouvelle information ne soit qu’une menace temporaire, exagérée, voire non fondée, mais une menace quand même. Qui a raison ? Qui a tort ? Bien difficile de le dire.

Les investisseurs, tel Warren Buffett, recherchent les aubaines, c’est-à-dire les titres qui se vendent à des multiples cours/bénéfices (C/B) ou cours/valeur comptable (V/VC) inférieurs à la moyenne des titres de leur secteur ou, mieux encore, inférieurs à leur moyenne historique. Et ils ont raison de le faire car le rendement des titres qui ont de bas ratios C/VC est bien supérieur à ceux qui ont de hauts ratios C/VC. La valeur ajoutée des titres à bas ratios C/VC aux Etats-Unis, entre 1926 et 1997, a été de 0,43 % par mois. Ce qui représente un rendement additionnel de plus de 5 % sur une base annuelle. Les économistes financiers vous diront que cette prime n’est pas gratuite, ne serait-ce que parce que les entreprises qui ont un bas ratio C/VC ont plus de chances de faire faillite que les entreprises qui ont un haut ratio C/VC.

Ce qu’on a appelé « l’effet valeur » n’est pas la seule opportunité intéressante des marchés financiers. Deux autres opportunités, moins constantes et moins payantes toutefois, ont donné lieu à des centaines d’articles académiques et de thèses de doctorat : l’effet taille d’une part, et l’effet momentum d’autre part.

Les entreprises de très petite taille ont démontré depuis longtemps leur capacité à générer un meilleur rendement que les entreprises de grande taille. La valeur ajoutée de l’effet taille, entre 1926 et 1997, a été de 0,20 % par mois, ou 6 % de gain net supplémentaire par année.

Les actions qui gagnent de la valeur depuis un an performent nettement mieux, l’année suivante, que les actions qui ont baissé de valeur lors de la même période. En d’autres termes, il est préférable d’acheter ce qui monte que ce qui baisse. C’est ce qu’on a appelé l’effet momentum. En fait, tout ce qui monte beaucoup depuis 3, 6 et 12 mois a tendance à faire mieux que le marché lors des 3, 6 et 12 mois suivants. Au-delà d’un horizon de 12 mois et en bas d’un horizon de 3 mois, il n’y a pratiquement rien à gagner de significatif.

Les chercheurs s’entendent habituellement pour dire que l’effet valeur est le plus important des trois, dans la mesure où il permet d’obtenir des rendements supérieurs à ceux générés par l’effet taille et l’effet momentum. Et la taille des entreprises, selon certains, serait un élément plus important que l’effet momentum. Il est toutefois assez difficile d’établir l’effet net, indépendant de tout autre facteur, des trois anomalies de marché sur le rendement du portefeuille, car elles sont relativement imbriquées l’une dans l’autre.

Par exemple, les titres qui font partie du 10 % des entreprises les plus petites du marché en termes de capitalisation boursière (le 10e décile disons) comportent une bonne part de compagnies qui ont subi une forte correction sur le marché, les faisant ainsi passer du 8e ou 9e décile, au 10e décile. Quand on mesure la taille des compagnies selon le critère de la capitalisation boursière, il est facile de comprendre qu’un titre qui subit une correction boursière de 50 % voit sa capitalisation boursière, et donc sa taille, chuter de 50 %.

Pour contourner ce problème, certains chercheurs comme Robert Arnott ont choisi de mesurer la taille des entreprises selon leur chiffre de vente ou leur valeur comptable, plutôt qu’en fonction de leur capitalisation boursière, de sorte que le prix de l’action n’intervient pas dans la mesure de la taille des entreprises. Résultat : le rendement excédentaire de l’effet taille chute de deux tiers. En d’autres termes, la valeur ajoutée de l’effet taille n’est pas de 6 % par année mais de 2 %.

Réciproquement, c’est l’effet valeur qui est beaucoup plus important (trois fois plus) que ce qu’on croyait quand on l’isole correctement de la taille des entreprises mesurées selon la capitalisation boursière. Pour les gestionnaires de portefeuille qui peuvent se permettre d’investir dans ce créneau, la stratégie la plus lucrative reste quand même celle des très petites entreprises ayant un ratio cours/valeur comptable inférieur à 1.

Comprendre le momentum

Le questionnement du milieu académique sur l’effet momentum n’est pas tout à fait du même ordre que celui sur l’effet taille ou l’effet valeur. La grande question qui préoccupe les chercheurs depuis quelques années est celle de savoir si le momentum est lié ou non aux rendements des différents secteurs industriels.

On sait très bien que les écarts de rendement entre les grands secteurs sont considérables. Pendant que certaines industries ont le vent dans les voiles (c’est le cas depuis quelques temps du pétrole, des métaux, des banques, etc.), d’autres vivent des heures difficiles (cas actuel des pharmaceutiques, papetières, imprimeries, technos, etc.). Dans ces conditions, pour capter l’effet momentum, faut-il nécessairement sur-pondérer son portefeuille dans certains secteurs, et le sous-pondérer dans d’autres ?

Pour l’heure, il n’y a pas de consensus entre les chercheurs. Certains croient qu’on peut profiter d’un effet momentum en ciblant des titres seulement, sans se préoccuper de leur secteur, d’autres pensent plutôt que l’effet momentum consiste d’abord à rechercher les secteurs qui marchent, et ensuite les meilleures entreprises qui composent ces secteurs.

Une étude récente de Alan Scowcroft et James Sefton, couvant la période 1980-2003, coupe la poire en deux. Pour l’univers des grandes capitalisations à l’échelle mondiale, l’effet momemtum est surtout une question d’industrie, tandis que dans l’univers des petites capitalisations, aux Etats-Unis notamment, l’effet momentum se trouve au niveau des compagnies en particulier, sans égard à leur secteur.

L’explication de ce phénomène, selon les deux chercheurs, serait redevable au processus de diffusion des nouvelles pour les grandes et petites entreprises, qui n’est pas le même de part et d’autre. Ainsi, quand une grande entreprise annonce des profits plus élevés que prévus sur un trimestre, la nouvelle a beaucoup de chance d’être interprétée comme une amélioration des affaires pour toutes les grandes compagnies du même secteur. Que Exxon annonce des profits supérieurs aux anticipations des analystes, les chances sont bonnes que les actions de Petro-Canada, Shell et BP profitent également de la nouvelle. Cette réaction est normale quand on sait à quel point les investisseurs ont de la difficulté à distinguer les améliorations dans une industrie entière de celles qui concernent une entreprise en particulier.

Dans le cas des petites entreprises, les investisseurs ont le sentiment que leur performance financière est plus une question de gestion interne, de gouvernance et de stratégies de pénétration de marché que de cycles économiques ou des aléas dans chacune des industries. Le momentum d’un titre de small cap se poursuivra tant que des signaux à l’intérieur de l’entreprise elle-même confirmeront que les affaires vont mieux que prévu.

Pour les investisseurs qui accordent un certain crédit à la recherche académique et qui ne gèrent pas des milliards de dollars, la meilleure stratégie consiste sans doute à investir dans les titres de petites capitalisations qui constituent de bonnes aubaines en termes de ratio cours/valeur comptable (C/VC < 1), et dont l’action connaît un bon momentum depuis 6 à 12 mois. Bref, il s’agit de combiner, en une seule et même stratégie, les trois plus importants « effets boursiers » découverts par la finance moderne. C’est comme d’avoir le beurre, l’argent du beurre… et la beurrière.

André Gosselin, vice-président recherche, Orientation Finance

Références :

Robert Arnott, « Disentangling size and value », Financial Analysts Journal, septembre/octobre 2005, p. 12-15.

Alan Scowcroft et James Sefton, “Understanding momentum”, Financial Analysts Journal, mars/avril 2005, p. 64-82.

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